Le film d’Yvan Attal, le Brio est un film, certes, sociétal, mais il garde un ton léger, drôle et est empreint de beaucoup d’émotion. Yvan Attal confie : «Le
personnage de Neïla, française d’origine algérienne retrace un peu mon parcours. Je me sens très proche de cette histoire. Quand Camilla Jordana dans le film dit : «Je suis Neïla Salah, née à
Créteil, fille de ..». Cela me renvoie à ma propre jeunesse, à la Cité de Créteil où j’ai grandi et au fait que le théâtre m’a permis de m’ouvrir au monde, par le travail et par la connaissance des
textes.
Neïla le fait par le biais de la Rhétorique, de l’Eloquence, au sein de la Faculté de Droit d’Assas, moi je l’ai fait grâce au théâtre. Le point de départ de ce film a été la lecture d’un scénario de
Yaël Langman et de Victor Saint-Macary que je me suis appoprié avec l’aide d’un autre scénariste, Noé Debré. J’ai gommé le côté politiquement correct, supprimé certains personnages. C’est moins une
comédie que dans le scénario originel, mais certains passages restent cependant très comiques.» L’idée qui sous-tend le film est que nous devons, quelque soit notre origine, nous ouvrir à l’héritage
culturel du pays dans lequel nous vivons, en accepter les codes et ainsi dépasser les préjugés, les clichés. Pour certains jeunes des banlieues, la manière de s’en sortir est de devenir footballeur,
rappeur ou chauffeur Uber. Leïla au contraire est persuadée qu’en faisant des études supérieures, elle pourra s’en sortir, bien que son petit copain Mounir l’en dissuade, lui reproche sa candeur et
sa naïveté en lui disant que son nom seul la stigmatisera et l’empêchera de réussir.»
Le personnage de Pierre Masard, prof de Droit cynique, provocateur, imbu de son savoir et dans la toute puissance est magistralement interprété par Daniel Auteuil qui
pense qu’: «Au fond Pierre Mazard n’est pas raciste, qu’il est plutôt provocateur et qu’en fait, il adore faire voler en éclats les clichés du politiquement correct, de la pensée unique. Il accepte
au départ de préparer Neïla au concours d’éloquence, non par altruisme, mais pour échapper à une sanction administrative car il est accusé de racisme par ses étudiants, témoins de son harcèlement et
de son acharnement à l’encontre de Neïla. Il a, en effet, proféré des propos racistes à plusieurs reprises à son égard. Le directeur de l’Université suggère donc à Pierre Mazard d’échapper à la
sanction en préparant la jeune étudiante au prestigieux concours d’éloquence. Ce qui lui permettra de faire amende honorable et d’être réhabilité. Il accepte donc par pur intérêt, mais finit
par se piquer au jeu. Une réelle complicité se noue alors entre ces deux êtres qu’au départ tout sépare et qui n’ont absolument aucune affinité. «Lorsque j’ai lu le scénario, j’ai immédiatement
pensé à une sorte de Pygmalion contemporain. Le personnage peut paraître antipathique au premier abord. Il est dur, sans concessions, mais il me touche car il est dans la transmission. C’est un
passeur, même si sa manière de le faire est très particulière. C’est un film sur les préjugés avec une happy end car à la fin, l’intelligence triomphe. Le parcours personnel du personnage que
j’incarne a sans doute été difficile, mais il n’est pas évoqué et reste mystérieux, énigmatique. Ce rôle n’était pas évident à interpréter mais c’était un beau challenge.» explique Daniel
Auteuil.
Camélia Jordana qui a été choisie à l’issue d’un casting après avoir travaillé une des scènes du film explique : «Pour moi, un film doit évoquer une cause qui me tient à cœur. Le personnage de Neïla
m’a beaucoup touché. Comme elle, je connais la stigmatisation, le racisme ordinaire. Je me fais contrôler jusqu’à trois fois dans la même semaine si je suis en jean, baskets et les cheveux
frisés, au naturel. Par contre, si j’ai un brushing et un tailleur, je ne ne suis pas importunée par la police. Neïla est une jeune fille qui a compris que la langue était une arme et qu’en la
maîtrisant, elle pourrait se défendre et défendre ceux qui en ont besoin. La rencontre de Neïla avec Pierre Mazard se fait par hasard, parce qu’elle est en retard et elle est explosive. Je ne pense
pas que Pierre Mazard soit un raciste inculte. C’est plutôt un provocateur, un homme seul qui, tous les ans, trouve une nouvelle tête de turc. Je me suis tout de suite sentie en confiance avec Daniel
Auteuil et Yvan Attal pour lesquels j’ai beaucoup d’admiration.»
Un beau film sur la transmission, le pouvoir des mots et le vivre ensemble qui ne sombre pas dans le militantisme et les clichés du politiquement correct. Un excellent scénario et des acteurs
remarquables. A voir !
Le synopsis est le suivant :
Neïla Salah a grandi à Créteil et rêve de devenir avocate. Inscrite à la grande université parisienne d’Assas, elle se confronte dès le premier jour à Pierre Mazard, professeur connu pour ses provocations et ses dérapages. Pour se racheter une conduite, ce dernier accepte de préparer Neïla au prestigieux concours d’éloquence. A la fois cynique et exigeant, Pierre pourrait devenir le mentor dont elle a besoin… Encore faudrait-il qu’ils parviennent tous les deux à dépasser leurs préjugés.
Sortie le 22 novembre
Catherine Merveilleux
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