Le Jour et La Nuit
Le Jour et La Nuit

Zabou Breitman et Billie Blain

 

Cassandre de Hélène Merlin, un premier film puissant et émouvant

C’est au Festival du film de société de Royan que j’ai eu le plaisir d’interviewer Hélène Merlin pour son premier film Cassandre. Un film à la fois fort et tout en nuances et l’occasion de découvrir une scénariste et une réalisatrice qui n’a pas fini de faire parler d’elle.

Le synopsis est le suivant : Été 1998. Cassandre a 14 ans. Elle vit dans une famille dysfonctionnelle et quelque peu toxique dans un petit manoir à la campagne. Son père, un colonel psychorigide, militaire de carrière ne badine pas avec l’autorité ; sa mère, quant à elle, sans filtre et haute en couleurs a une conception très particulière de l’éducation de ses enfants.

 

Hélène Merlin

 

Catherine Merveilleux : Le père de Cassandre se fâche avec le moniteur du centre militaire d’équitation où s’entraîne sa fille Cassandre, elle intègre donc un petit centre équestre aux méthodes très différentes du centre équestre militaire …

 

Hélène Merlin : C’est une chance qui lui permet de s’extraire et de s'échapper d’une famille particulière, fusionnelle et toxique qui l'engloutit. Le fait d’intégrer ce centre équestre lui permet de s’émanciper, de découvrir une autre normalité et d’échapper à un père tyrannique et trop puissant.

 

C.M.: En exergue du film, le spectateur peut lire que le film est librement inspiré de faits réels mais romancés. Est-ce exact ?

 

H.M.: C’est exact, ce film est une adaptation de faits réels librement adaptés. Il faut replacer l’histoire dans son contexte. Les faits se passent en 1998 et les parents de Cassandre sont des héritiers de 1968. C’était une époque où Gabriel Matzneff intervenait sur les plateaux de télévision et prônait l’éveil à la sexualité des enfants et des très jeunes adolescents. Le sujet n’était pas tabou. Bien au contraire. C’était aussi l’époque où la télévision diffusait des émissions à forte connotation pornographique. C’était une époque de libération sexuelle impensable aujourd’hui où Il n’existait pas de limites, ni de tabous et où il était admis de satisfaire ses pulsions.

 

C.M.: Vous évoquez un sujet sensible, celui d’une relation entre un frère et une sœur. C’est un sujet rarement abordé au cinéma que vous abordez de façon subtile.

 

H.M.: Je voulais montrer cette relation de façon nuancée. Elle est suggérée. Je ne voulais pas jeter des corps nus en pâture. Je voulais surtout montrer que l’héroïne souffrait d’un stress post traumatique pour lequel il lui faudrait de longues années de psychanalyse pour se libérer.

 

C.M.: Les marionnettes sont, je suppose des objets transitionnels qui lui permettent de se livrer à une catharsis…

 

H.M.: Les marionnettes interviennent après chaque traumatisme. Elles sont à distance des scènes violentes intenses. Elles lui permettent de se libérer. Elle ne peut pas mettre de mots sur ce qu’elle vit. Elle exprime sa douleur à travers ces marionnettes décharnées et désarticulées qui lui permettent de transférer et d’exprimer sa souffrance.

 

Jimi Andreani et Hélène Merlin. Crédit photo Fotogrif

 

C.M.: Le personnage du frère est celui d’un mâle dominant …

 

H.M.: C’est un prédateur. Sa sœur est plus forte que lui dans tous les domaines. Que ce soit intellectuellement ou sportivement. La soumettre sexuellement est une manière de reprendre sa place d’aîné et de compenser le fait qu’il soit broyé par son père.

 

C.M.: Le prénom de l’héroïne Cassandre est elle une référence à la mythologie grecque ?

 

H.M.: Dans la mythologie, Cassandre reçoit d’Apollon le droit de dire l’avenir en échange de la promesse de s’offrir à lui. Se refusant au dieu, ce dernier décrète que ses prédictions ne seront jamais crues, même de sa famille. C’est ce qui arrive à Cassandre, mon héroïne qui n’est pas crue lorsqu’elle dénonce les abus dont elle est victime. Elle est un symbole des femmes qui ne sont pas crues lorsqu’elles révèlent des abus sexuels.

 

C.M.: Le directeur de la photographie est David Calley ?

 

H.M.: J’ai eu beaucoup de chance car comme vous le savez David Calley est le chef opérateur du film Le Règne animal

 

C.M.: C’est votre premier long métrage…

 

H.M.: Je l’ai écrit et réalisé dans le cadre de l'atelier scénario de La Fémis en collaboration avec Clara Bourreau. J’ai eu beaucoup de chance. Déjà d’avoir un chef de la photographie comme David Calley et ensuite de réunir un aussi beau casting. Billie Blain qui jouait dans le Règne animal incarne tout à fait Cassandre et toute la violence qui émane d’elle. Eric Ruf est un père exceptionnel. Zabou Breitman quant à elle, incarne tout à fait la mère excentrique, sans filtre et sans tabous que je recherchais.

 

Cassandre interprétée par Billie Blain

 

Pour info : Certaines scènes ou propos peuvent heurter la sensibilité des plus jeunes. Le film est hors compétition.

 

Mon avis : Un film puissant et émouvant.

 

Sortie : 2 avril 2024

 

Réalisation : Hélène Merlin

 

Casting : Billie Blain, Zabou Breitman, Éric Ruf de La Comédie Française, Florian Lesieur, Laïka Blanc-Francard, Guillaume Gouix, une fille production

Catherine Merveilleux

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