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Ella Rumpf  © Apsara Films. Film des Preuves d'amour

 

Des Preuves d’amour, un film sensible et tout en nuances d’Alice Douard

Après son court métrage «l’Attente» césarisé, Alice Douard voit son premier long métrage «Des Preuves d’amour», un film lumineux sur l’Amour et la filiation sélectionné dans la Semaine de la critique au Festival de Cannes. Interview avec une jeune réalisatrice pleine de talent et de promesses.

 

Synopsis : Céline attend l’arrivée de son premier enfant. Mais elle n’est pas enceinte. Dans trois mois, c’est Nadia, sa femme, qui donnera naissance à leur fille. Sous le regard de ses amis, de sa mère, et aux yeux de la loi, elle cherche sa place et sa légitimité.

 

Catherine Merveilleux : Votre premier long métrage vient d’être projeté à Cannes après que votre court-métrage « l’Attente » ait été césarisé. Comment vivez-vous cette ascension fulgurante ?

 

Alice Douard : Je suis ravie, bien sûr mais j’avais déjà réalisé 4 courts métrages avant l’Attente. Il m’a fallu 10 ans après la Fémis pour accéder à la notoriété et être reconnue.

 

 

C.M. : Le film raconte l’histoire de deux femmes qui décident d’avoir un enfant ensemble. L’une, Nadia ( Monia Chokri ) le porte. L’autre, Céline ( Ella Rumpf ) pour être reconnue en tant que parent doit monter un dossier juridique. L’intrigue et la structure du film reposent sur les étapes d’une démarche juridique d’adoption, sur une procédure très spécifique. Elles doivent réunir 15 attestations, 15 témoignages qui prouvent les liens de la maman qui ne porte pas l’enfant avec celui-ci. Comment avez-vous pris connaissance de cette procédure induite par la loi Taubira ? Est-ce autobiographique ?

 

A.D. : C’est mon histoire. C’est tout à fait autobiographique. J’ai vécu moi-même ce parcours du combattant et cette procédure lorsque j’ai voulu être reconnue en tant que mère de notre fille June. J’ai dû prendre une avocate, faire une demande d’adoption et j’ai du attendre qu’elle soit acceptée sinon je n’avais aucun droit sur notre fille. Elle ne figurait pas sur ma carte vitale. Je n’avais pas le droit en l’emmener en avion sans autorisation parentale de sa maman biologique. Elle ne figurait pas sur mon livret de famille etc … En cas cas de décès, je n’aurais eu aucun droit sur elle.

 

C.M. : Comment se fait le choix de celle qui portera le bébé ?

 

A.D. : Nous en avons parlé pendant plusieurs années. 3, 4, 5 ans. Ce fut le fruit d’âpres discussions.

 

Alice Douard © Catherine Merveilleux JNP

 

C.M. : La thématique est sérieuse mais le film n’est pas dénué d’humour. Le passage avec un médecin quelque peu maladroit est un pur moment d’anthologie, tout comme les scènes où Céline fait des stages chez l’un de ses amis pour apprendre à être mère …

 

A.D. : Ce n’est pas un film militant didactique. C’est plutôt un film destiné à faire comprendre en douceur cette problématique. Nous avons souvent rencontré nous-mêmes ce genre de situations cocasses, non que les personnes en question aient été animées de mauvaises intentions mais parce qu’elles étaient déstabilisées par une situation inhabituelle.

 

C.M. : Le film met en évidence le fait qu’attendre un bébé suscite pour une femme une véritable interrogation sur ses rapports avec sa propre mère interprétée par Noémie Lvosky. C’est une mère imparfaite mais elle reste néanmoins sympathique.

 

A.D. : Mon film n’est pas manichéen. Aucun personnage n’est animé de malveillance.

 

C.M. : Comment réagissent les parents d’un couple non-binaire dans ce genre de situation ? Réagissent-ils comme la maman de Céline qui trahit imperceptiblement à son insu un moment de déception lorsqu’ elle apprend que l’enfant attendu n’est pas porté par sa fille mais par sa compagne.

 

A.D. : C’est dans un premier temps souvent le cas mais très vite lorsque l’enfant est présent, ce sentiment disparaît.

C.M. : En fait, le questionnement de Céline sur sa place de mère et son aptitude à devenir mère n’est-il pas universel ? N’est -il pas le même que celui du père qui cherche sa place lui aussi ?

 

A.D. : Le film pose effectivement une question universelle qui est : Qu’est ce que c’est qu’être parent ? Qu’est-ce qu’être un bon père, une bonne mère ? L’héroïne Céline n’en a aucune idée, elle qui a grandi avec une mère absente privilégiant sa carrière au détriment du temps passé avec sa fille.

 

C.M. : Depuis 2014, la procédure a-t-elle évolué ?

 

A.D. : Oui, l’histoire que je raconte se passe en 2014 après que la loi Taubira du 13 avril 2013 ait autorisé le mariage entre personnes du même sexe. Depuis la loi de Bioéthique de 2021, la procédure a évolué.

 

C.M. : Comment va June, votre petit fille ?

 

A.D. : Elle est en week-end de la Pentecôte à Montpellier. Elle a sept ans. Elle est au CP. Elle sait lire. C’est une petite fille heureuse.

 

C.M. : Comment s’est opéré le choix des actrices ?

 

A.D. : J’avais Ella Rumpf ( Céline) très tôt en tête et Monia Chokri ( Nadia) dès que je l’ai vue en casting s’est imposée comme une évidence.

 

Un film de : Alice Douard

 

Casting : Ella Rumpf, Monia Chokri , Noémie Lvosky, Félix Kysyl, Anne Le Ny, Julien Gaspard-Oliveri, Édouard Sulpice, Eva Huault

 

Date de sortie : 19 novembre

Catherine Merveilleux

 

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