Ingrid Riocreux, agrégée de lettres modernes et docteur de l’Université Paris-Sorbonne vient d’écrire un essai intitulé : La Langue des médias - Destruction du langage et fabrication du consentement. Elle y passe au crible et analyse avec finesse et pertinence le discours journalistique et se pose la question : « Les journalistes se présentent volontiers comme des adeptes du décryptage. Mais est-il autorisé de décrypter leur discours ? » Pour ce faire, elle analyse de très nombreux exemples récents et démontre que les journalistes ne cessent de reproduire des tournures de phrases et des termes qui impliquent un jugement éthique et catégorique sur les événements. Ils posent comme des axiomes, des postulats qui ne sont que des opinions et les font passer pour des réalités objectives alors que ces opinions sont assujetties à des courants de pensée subjectifs, inféodés à des idéologies philosophiques ou politiques. C’est ainsi que se créent des préjugés profondément enracinés dans l’inconscient populaire.
Préjugés qui paralysent la réflexion et l’analyse et qui faussent le jugement objectif et impartial.
Le sujet de la manipulation avait déjà été abordé dans l’essai La Psychologie des foules de Gustave Lebon ou plus récemment par le linguiste nord-américain Noam Chomsky qui a élaboré une liste des
Dix stratégies de manipulation à travers les médias. Ceux-ci vont de la stratégie de la distraction à la stratégie du différé, en passant par le fait de faire appel à l’émotionnel plutôt qu’à la
réflexion et surtout par le fait de remplacer la révolte par la culpabilité.
Le livre d’Ingrid Riocreux est conçu comme un manuel de réception intelligente à l’usage des lecteurs, des auditeurs ou des téléspectateurs. Son objectif et son ambition sont de lutter contre
l’angélisme, la naïveté, la crédulité ou par la paranoïa complotiste.
Un essai passionnant qui pulvérise les dogmes, la hiérarchisation des sujets et qui montre que la Langue des médias véhicule tous les préjugés de notre temps, toutes ces vérités tenues pour
évidentes, quoique jamais démontrées qui jettent l’anathème et diabolisent certaines personnes d’une manière arbitraire car elles n’adhèrent pas aveuglément à la Pensée unique. Les journalistes, dans
la majorité des cas, au lieu de rechercher la Vérité contribuent à répandre une doxa faite de postulats, de stéréotypes et de présupposés. Bref ces nouveaux chiens de garde font voir le monde à
travers le prisme d’une vitre sale ou déformée.
La Langue des médias
Un essai de Ingrid Riocreux
Catherine Merveilleux
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