Dès le début du débat, Michel Onfray fait le constat inquiétant que l’évolution mercantile des médias, plus soucieux d’audimat et de rentrées publicitaires que de
qualité intellectuelle, a nivelé vers le bas les émissions sensées être des espaces de débat. «On ne peut débattre que là où l’argent ne fait pas la loi. Autrefois, il y existait des émissions où
l’on laissait les invités s’exprimer. Cette époque est bien révolue. Maintenant, ce qui est privilégié, c’est le buzz, la phrase assassine, le bon mot, le mépris, les insultes. Les émissions ne sont
plus en direct, elles sont pré-enregistrées et certaines séquences sont coupées au montage si elles dérogent au politiquement correct. Les déclarations des intervenants sont tronquées et perdent leur
sens initial et intrinsèque. L’intelligence bafouée disparaît au profit de la grossièreté et de l’indigence intellectuelle. Aujourd’hui, règne l’omerta, la censure. «Des gens comme Coluche ou
Pierre Desproges seraient, de nos jours, en prison» précise Franz-Olivier Giesberg. «C’est d’ailleurs la même chose dans l’espace privé et en famille» poursuit Michel Onfray. «C’est la foire
d’empoigne, certains monopolisent la parole et on ne s’écoute plus. A notre époque, il n’y a plus de débats dignes de ce nom dans les médias et à la télévision. Certains sujets sont tabous et celui
qui dit la vérité sans être inféodé à aucune obédience est accusé d’appartenir à tel ou tel parti politique. Si Marine Lepen énonce une évidence comme «Noël est le 25 décembre» et que je déclare
qu’elle a tout à fait raison, je risque d’être diabolisé et taxé d’extrémiste de droite. Une chape de plomb pèse sur bon nombre de thématiques et de sujets qu’il est dangereux d’aborder. Un
manichéisme absolu règne en France. Il y a les méchants et les gentils. Hors du cercle de raison et de la pensée unique, point de salut.»
Les deux hommes ont ensuite abordé les fléaux successifs qui ont causé le naufrage de l’Ecole républicaine et Michel Onfray a expliqué : «Mon père ouvrier agricole a quitté l’école à 12 ans sachant
lire, écrire, compter et réfléchir. Le tri sélectif et tous les sujets superfétatoires qui sont étudiés de nos jours au détriment des fondamentaux sont une dérive qui nivelle l’Ecole
républicaine vers le bas. J’ai accepté de rencontrer le ministre de l’Education nationale pour échanger avec lui à ce sujet.» Les deux hommes après avoir longuement débattu sur l’éducation, la
mondialisation, l’Europe, le terrorisme et ses causes, la peine de mort, l’égalité homme-femme, l’égalitarisme, cette chimère néfaste ont fini par conclure qu’il existait heureusement des lieux
privilégiés et alternatifs comme certains médias alternatifs et le théâtre Toursky où l’on pouvait débattre de tout sans se faire conspuer, se faire huer et insulter. L’objectif d’un débat est de
s’écouter et d’échanger. Franz-Ollivier Giebert a, quant à lui, annoncé qu’il allait lancer une vaste campagne de souscription par l’intermédiaire de la Provence pour soutenir le mythique théâtre
Toursky que son directeur, Richard Martin depuis des années défend contre vents et marées, malgré les subventions supprimées et les promesses non tenues. «Ce haut lieu de l’intelligence est l’un de
ces lieux alternatifs où l’on peut encore penser sans préjugés. C’est un espace de liberté qu’il faut protéger et la Provence a décidé de le soutenir.» at-il conclu sous une salve
d’applaudissements.
Catherine Merveilleux
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